Réévaluation d'Avatar : Comment 16 ans après, la saga de James Cameron m'a ouvert les yeux sur sa profondeur et sa complexité

Titre original : "Je me suis trompé" 16 ans après Avatar, j’ai donné une seconde chance à la saga de James Cameron : j’ai ouvert les yeux, et certains devraient en faire autant

Dans quelques jours, l’immense saga de James Cameron, celle qui trône en haut des plus grands succès du box-office, sera de nouveau placarder sur la devanture des cinémas français. Après une petite absence de trois ans (bien moins longue que par le passé, je vous l’accorde), Avatar s’apprête à rallumer la flamme avec De Feu et de Cendres. À l’approche de cette sortie, j’ai eu une idée toute simple : me confronter à une saga qui m’avait presque laissé de marbre seize ans plus tôt ! Alors que je pensais n’en avoir rien à faire de la saga, j’ai désormais un regard bien différent : il n’est jamais trop tard pour revoir son jugement !

Il m’a fallu 16 ans pour ouvrir les yeux : j’ai mal jugé Avatar et ce visionnage a été mon mea-culpa

Il n’y a pas si longtemps, j’ai réalisé qu’entre ma naissance et le moment où ces lignes sont écrites, il y avait le long-métrage Avatar de James Cameron. Aussi étonnant que ça puisse paraître et en dépit des nombreuses séances de cinéma que j’ai pu vivre, j’ai de vagues souvenirs de ce vendredi après-midi, béni par un emploi du temps de lycéen sensiblement allégé, où j’ai pris mon billet et mes lunettes 3D pour découvrir le blockbuster qui faisait sensation. Presque trois heures plus tard, je suis ressorti de la salle en classant le film dans la catégorie des blockbusters et autres grands divertissements hollywoodiens sans embrasser pleinement le récit de James Cameron qui venait de poser là sa première pierre. Certes, le long-métrage était efficace, massif, techniquement renversant. En peu de mots, une vraie prouesse visuelle et de cinéma, mais finalement assez « classique » dans ce qu’il racontait. Je pensais d'ailleurs en avoir définitivement fait le tour. Et puis j’ai revu le film.

"Je me suis trompé" 16 ans après Avatar, j’ai donné une seconde chance à la saga de James Cameron : j’ai ouvert les yeux, et certains devraient en faire autant

Car, oui, à l’approche de la sortie du troisième volet et gardant toujours en tête mon test du jeu vidéo Avatar : Frontiers of Pandora, il y a maintenant deux ans, j’ai eu l’envie folle de m’installer pendant près de six heures sur mon canapé. Pas d'affilé, je vous rassure. Malgré cette motivation, j’avais peur de revivre un moment peu exaltant – j’avais revu le film à la télévision quelques années après ma séance, et je l’avais encore moins apprécié tant l’effet de surprise et les enjeux de l’intrigue n’avaient plus de secret –, même si c’était l’opportunité d’offrir une chance au second volet, que je n’avais pas pris le temps de visionner par manque d’entrain et d’intérêt, de me convaincre. Je redoutais un nouveau rendez-vous manqué ; pourtant, c’est effectivement ce qui s’est produit… à ma plus grande surprise. En le redécouvrant, j’ai réalisé à quel point je l’avais peut-être mal jugé, ou plutôt jugé trop tôt. Comme je le disais, à la sortie d’Avatar, premier du nom, je venais d’entrer au lycée, je n’avais pas encore seize ans, et j’étais très loin d’avoir développé le regard que j’ai aujourd’hui sur le cinéma, sur ce que j’en attends, et sur les thématiques qui me touchent.

"Je me suis trompé" 16 ans après Avatar, j’ai donné une seconde chance à la saga de James Cameron : j’ai ouvert les yeux, et certains devraient en faire autant

Revoir Avatar en 2025, c’est comme refaire le voyage vers Pandora… en ayant des bagages qui n’ont plus rien à voir avec ceux de l’époque, constitués de sensibilités qui ont évolué ou inédites. Et c’est sûrement pour cette raison que la surprise a été d’autant plus forte. Ce que je retiens, dans un premier temps, c’est la façon dont James Cameron parvient se mettre pleinement au service de son blockbuster, tout en conservant sa vision de cinéaste et d’artiste. Oui, l’immersion et la mise en scène sont tout ce qu’on attend d’une superproduction hollywoodienne, mais l’essentiel, à savoir le récit, n’est jamais abandonné en cours de route. En le revoyant, j’ai également pris conscience du savoir-faire et de la maîtrise technologique de Cameron. Les effets spéciaux sont impressionnants et loin d’avoir vieilli, et j’ai réalisé que le cinéaste ne les utilisait comme simple poudre aux yeux : ils nourrissent l’immersion, et James Cameron s’en sert à chaque instant pour construire un monde, une cohérence, une logique et, surtout, une sensation de dépaysement total et de liberté sidérante, notamment lors de certaines séquences à travers Pandora.

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Le montage, lui aussi, m’est apparu bien plus maîtrisé que dans mes souvenirs d’adolescent. Certes, le film flirte avec les trois heures, mais je n’ai jamais ressenti sa longueur, même si les scènes d’action sont loin d’être prédominantes. Non, le film de James Cameron n’est pas qu’un conflit entre humains et Na’Vis rempli de batailles intempestives. Il est peut-être un blockbuster, une production de pur divertissement, mais ce n’est qu’une façade, car, comme le vidéaste Julien Pavageau l’explique dans son ouvrage dédié au réalisateur chez Third Editions, James Cameron utilise ce genre comme un cheval de Troie, une porte d’entrée vers quelque chose de plus intime, de plus profond, presque de plus sensible. À partir de là, j’ai vu ce que contenait réellement ce cheval de bois… et ai compris qu'Avatar n’était pas un simple divertissement : c’était la première pierre d’une vision d’ensemble, d’une fresque plus large. Ce que je prenais autrefois pour un spectacle démesuré était en réalité une proposition de cinéma beaucoup plus complexe, portée par une intention qui m’avait absolument échappé à quinze ans. Une preuve supplémentaire que les films de James Cameron réussissent à épouser divers points de vue au cours d’une vie et s’adaptent aux attentes du spectateur.

"Je me suis trompé" 16 ans après Avatar, j’ai donné une seconde chance à la saga de James Cameron : j’ai ouvert les yeux, et certains devraient en faire autant

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Ma redécouverte d’Avatar ne serait rien sans le second volet, c’est lui qui a tout déclenché

Pour autant, c’est avec Avatar : La Voie de l’eau que ma « révélation » s’est cristallisée et j’ai ainsi pu prendre conscience que je me suis trompé au sujet de cette saga. Cette suite — souvent jugée plus lente, trop longue et trop visuelle — a pourtant été pour moi le moment où les premières pièces du puzzle se sont imbriquées. C’est là que j’ai compris qu’il fallait envisager Avatar comme une saga, comme une fresque pensée pour être lue dans son ensemble, et non comme une succession de grands films technologiques dissociés les uns des autres. Pourtant critiqué sur ce point, à savoir l’émotion, Avatar : La Voie de l’eau m’a fait réaliser qu’il y avait presque une approche de cinéma d’auteur ou, du moins, une vision d’artiste derrière cette superproduction hollywoodienne. Comme si, en un grattant la couche supérieure, on allait pouvoir déterrer le propos et la sensibilité insufflés par James Cameron. D’ailleurs, l’introduction de l’eau, élément absolument central dans la vie comme dans la carrière de Cameron (je pense à Abyss, à Titanic, à sa passion pour les fonds marins), n’a rien d’un gadget. C’est une manière d’élargir Pandora, de nous inviter à contempler autrement le rapport à la nature et à ses équilibres fragiles.

"Je me suis trompé" 16 ans après Avatar, j’ai donné une seconde chance à la saga de James Cameron : j’ai ouvert les yeux, et certains devraient en faire autant

Là où le premier film posait les bases, développait tout un écosystème, le second volet ouvre une porte sur une multitude de thématiques comme l'identité, l’écologie, la famille, la transmission, la différence, la cause animale, la place de l’homme dans un monde qui n’est pas le sien. Et plus que le périple d’un seul homme, ce sont les enfants de Jake et Neytiri qui deviennent les porteurs des questionnements du film. Lo’ak cristallise la quête de reconnaissance, Spider pose la question de la frontière entre deux mondes qui ne se comprennent pas toujours, Kiri questionne sans cesse la notion d’identité et le but de notre existence. Petit bout par petit bout, on se retrouve à assembler une fresque humaine, une saga presque théâtrale, où chaque personnage possède sa propre quête, son propre segment. Ce rythme assumé — trop lent au goût de certains — a fait l’objet de nombreuses critiques, mais c’est précisément cette lenteur qui m’a permis de ressentir l’ambition de James Cameron. Ici, l’idée n’est pas de nous faire vivre une succession d’explosions, mais une expérience qu’on traverse, qu’on vit et dans laquelle on s’immerge pleinement. En soi, au-delà de revoir mon jugement, j’ai eu la chance de développer un oeil nouveau sur cette saga.

"Je me suis trompé" 16 ans après Avatar, j’ai donné une seconde chance à la saga de James Cameron : j’ai ouvert les yeux, et certains devraient en faire autant

Désormais, grâce à ce recul offert par les années et en attendant encore plus de pièces pour compléter la fresque, je me rends compte qu’Avatar est peut-être l’un des univers les plus éblouissants du cinéma moderne. Ce qui m’a surpris, c’est à quel point la saga a commencé à me toucher plus profondément que Star Wars, qui a pourtant forgé mon imaginaire d’enfant. Là où bon nombre de blockbusters actuels semblent coincés dans un moule de rentabilité, où l’on tente de faire tenir un propos dans un seul film, Cameron s’autorise la durée, l’ambition et, surtout, l’intention (créative, personnelle…). Rares sont les cinéastes à pouvoir déployer une œuvre sur une chronologie aussi longue et une échelle aussi démesurée. Rares sont les studios prêts à confier les clés du royaume à un seul cinéaste, en lui laissant la possibilité d’aller au bout de sa vision. James Cameron n’essaie pas d’être à la mode, de créer ce qui est sûr de fructifier au box-office, et il le sait. Ce qui fait sa force — et c’est aussi pour ça que la saga Avatar arrive enfin à m’enthousiasmer —, c’est justement cette fidélité absolue à ce qu’il veut raconter, à ce qu’il veut montrer, à ce qu’il veut défendre. Aujourd’hui, je vois Avatar comme un divertissement presque parfait parce qu’il parvient à créer une convergence autour de tout un tas de registres et de sujets. En fin de compte, Avatar est aussi l’idée qu’un blockbuster peut être un endroit où l’on réfléchit, où l’on ressent, où l’on change un peu. Au fond, c’est peut-être ça que j’emporte aujourd’hui. En tout cas, moi, j’ai changé.