Quand un créateur revient sur un projet qu’il a contribué à façonner, les mots pèsent lourd. Entre lucidité et bienveillance, un ancien développeur se penche sur Starfield, en quête de réponses sur ce qui a déraillé.
Sorti avec des attentes stratosphériques, Starfield devait être le grand retour de Bethesda à la science-fiction, un Skyrim dans l’espace. Pourtant, un an après sa sortie, le jeu reste souvent cité comme une déception, voire comme le « mouton noir » du studio. Bruce Nesmith, ancien designer chez Bethesda et l’un des concepteurs du projet, s’est récemment exprimé sur les raisons de cet échec et sa vision éclaire plusieurs failles fondamentales du jeu.
Le poids de la génération procédurale
Pour Nesmith, la racine du problème tient à une décision clé : celle de miser sur la génération procédurale pour créer les planètes du jeu. Là où Skyrim et Fallout brillaient par leurs environnements méticuleusement conçus à la main, Starfield a choisi de confier une large part de son univers à des algorithmes. Résultat : des planètes qui finissent par se ressembler, des explorations qui perdent leur sens d’émerveillement et une boucle de jeu qui s’essouffle. Il explique :
Quand les planètes commencent à toutes se ressembler, c’est là que tout s’écroule. On ne ressent plus d’excitation, plus de surprise.
Même constat pour la faune extraterrestre, cantonnée à un rôle purement décoratif : « Elles sont comme les loups de Skyrim : elles existent, mais elles ne racontent rien. »

Le vide de l’espace… et de l’expérience
Autre point faible selon le concepteur : la traversée spatiale. Loin d’être le cœur du jeu, elle se réduit à une succession d’écrans de chargement et de séquences sans enjeu. Paradoxalement, Nesmith défend cette approche : « Le vide spatial est, par nature, ennuyeux. C’est littéralement du rien. Le rendre palpitant sans trahir sa réalité est presque impossible. »

Des attentes impossibles à satisfaire
Pour autant, Nesmith ne renie pas Starfield. Il le considère comme un bon jeu, mais victime d’un contexte démesuré. Après Skyrim et Fallout, les fans attendaient un chef-d’œuvre absolu. « Si un autre studio avait sorti le même jeu, il aurait été mieux accueilli », estime-t-il. Malgré les critiques, Starfield reste un succès commercial solide. Mais pour beaucoup, il symbolise aussi la limite d’une formule Bethesda qu’il faudra désormais réinventer. Et pour Bruce Nesmith, c’est précisément ce constat : celui d’un potentiel gâché par la répétition, qui marque le point où « tout s’écroule ».