Ils étaient attendus, voire redoutés, ils sont là depuis quelques jours : les résultats annuels d’Ubisoft clôturent une année fiscale compliquée malgré des signaux encourageants. Ce qui semble certain, c’est que le tunnel à passer va être long pour l’éditeur français…
Ubisoft : des résultats décevants et des perspectives à court terme contrastées
Le géant français du jeu vidéo, Ubisoft, a enfin pu mettre un point final à cette année fiscale marquée par les contre performances. Avec un Star Wars Outlaws qui n’a pas rencontré son public, un XDefiant qui a dû capituler face aux autres ténors du genre et surtout après plusieurs reports d’Assassin’s Creed Shadows ayant mené à des révisions du Net Bookings (le chiffre d’affaires intégrant les montants liés aux contrats de licence), l’argent n’est pas entré comme les papas de Rayman l’avait initialement envisagé.
Malgré des perspectives sans cesse ajustées à la baisse, Ubisoft termine légèrement en dessous de ses prévisions, avec un Net Bookings s’élevant à 1,84 milliard d’euros, ce qui signifie une baisse de 20 % par rapport à l’exercice fiscal précédent qui avait lui aussi connu des déconvenues. Le résultat net de la société affiche une perte de 159 millions d’euros, alors que le groupe enregistrait un bénéfice net de 157 millions d’euros l’année dernière. En d’autres termes, et même si la firme à la spirale insiste sur sa trésorerie d’environ 1 milliard d’euros, ainsi que l’amélioration de la position de sa dette, les résultats sont ne sont pas à la hauteur des espérances. “Ubisoft a fait face à des défis cette année, avec des dynamiques contrastées au sein de notre portefeuille dans un environnement fortement concurrentiel”, commente Yves Guillemot, le PDG de l’entreprise.

Une “dynamique contrastée” qui pourrait mettre du temps avant de repartir vers des cimes enthousiasmantes. Dans ses prévisions pour l’exercice 2025-26, Ubisoft mise sur un Net Bookings stable et un résultat opérationnel proche de l’équilibre. Pourquoi autant de prudence ? Tout simplement parce que la société française prévoit l’artillerie lourde à partir du futur exercice qui débutera en avril 2026 ! “Le Groupe anticipe (...) l’arrivée de contenus significatifs provenant de ses principales franchises sur les exercices 2026-27 et 2027-28”, lit-on dans le rapport. Cela signifie que les nouveaux épisodes majeurs d’Assassin’s Creed et Far Cry ne débarqueront pas avant le 31 mars 2026. L’exercice 2025-26 devra donc se contenter des retombées d’Assassin’s Creed Shadows et des lancements de Siege X, Anno 117: Pax Romana, Rainbow Six Mobile ou encore The Division Resurgence pour porter les résultats de la société. Quant au remake de Prince of Persia : The Sands of Time, il devrait débarquer au début de l’année 2026, c’est-à-dire lors du dernier trimestre de l’année fiscale 2025-26.

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Du recul, oui, mais un peu d’avance, aussi
Les chiffres ainsi que les perspectives donnés par Ubisoft ont précipité son cours de Bourse dans le rouge vif. Le lendemain de la publication des résultats, le titre a chuté de 18,20 %, passant de 11,6 euros à 9,5 euros. Bien que l’industrie du jeu vidéo soit faite d’imprévus, les prévisions pour un retour possible des éclaircies au-delà de l'exercice 2025-26 incitent à la prudence. Les bonnes nouvelles sont pourtant là avec une amélioration de la dette, mais aussi les chiffres d’Assassin’s Creed Shadows qui semblent bons. On peut aussi compter sur une avance du calendrier en ce qui concerne la réduction des coûts et le souhait de l’éditeur de laisser plus de temps de développement aux équipes pour sortir des jeux mieux finis.

Réorganisation, filiale avec Tencent : une année 2025 sous le signe de la mutation
Si l’année fiscale en cours ne devrait pas être la plus excitante en matière de sorties d’envergure pour les joueurs, le constat est différent en ce qui concerne l’identité du groupe. Conformément aux précédentes annonces, l’entreprise dirigée par Yves Guillemot travaille sur la refonte de son organisation et sur l’optimisation de ses sorties en se concentrant sur les jeux d’Aventure en monde ouvert ainsi que sur les jeux service. La réorganisation du modèle opérationnel devrait être dévoilée à la fin de l’année, sous réserve de la consultation des instances représentatives du personnel locales, lit-on.

D'après Insider Gaming, Charlie Guillemot, le fils d’Yves Guillemot, fait partie du comité de transformation interne qui recommandera au comité exécutif le nouveau modèle opérationnel à suivre. Ubisoft se félicite en tout cas d’une baisse considérable de ses coûts fixes, une diminution de 12 % par rapport à l’exercice 2022-23. Ubisoft prévoit de réduire encore sa base de coûts fixes d’au moins 100 millions d’euros supplémentaires au cours des prochaines années.
Enfin, l’éditeur français a profité de la publication de ses résultats pour apporter plus d’informations sur la création de sa filiale avec Tencent annoncée à la fin du mois de mars. Pour rappel, cette dernière doit gérer les trois licences les plus porteuses de l’éditeur : Assassin’s Creed, Rainbow Six et Far Cry. Le but de cette filiale est de générer des revenus annuels de plus d’un milliard d’euros, ce qui permettra de désendetter la maison-mère tout en lui offrant plus de flexibilité. Tencent, en plus d’investir 1,16 milliard d’euros dans cette transaction, aidera Ubisoft à se développer sur des marchés qui ne sourient pas encore à l’éditeur français, tels que le mobile et la Chine. En outre, il est annoncé que cette filiale aura une équipe dirigeante dédiée qui inclura des recrutements externes et sera conseillée “par des vétérans de l’industrie”.
"Le maintien d’une discipline rigoureuse viendra soutenir nos ambitions de croissance ainsi que la transformation en profondeur engagée chez Ubisoft", affirme Yves Guillemot. Avant de conclure : "Ubisoft entame un nouveau chapitre, et j’ai confiance en notre capacité à construire une entreprise plus forte et plus résiliente, au bénéfice de l’ensemble de nos parties prenantes". Il reste à voir si cette confiance sera partagée par les acteurs du marché et, surtout, par les joueurs.