Le monde du cinéma est vaste et regorge d’œuvres de toutes durées et de tous genres. Certaines se distinguent non seulement par leur qualité, mais aussi par leur format, repoussant les limites de l’endurance du spectateur. C’est le cas d’un film salué par la critique et admiré par des cinéastes de renom, dont le célèbre Martin Scorsese, qui a décrit cette œuvre monumentale comme une “véritable expérience”.
Martin Scorsese, un maître du 7e Art américain
Martin Scorsese est une figure majeure du cinéma américain qui a émergé pendant la période du Nouvel Hollywood. Réalisateur prolifique, il est connu notamment pour des films emblématiques tels que Taxi Driver, Raging Bull, et Les Affranchis, trois de ses œuvres ayant été incluses dans la liste des 100 meilleurs films de l'American Film Institute. Au cours de sa longue et fructueuse carrière, il a reçu de nombreuses distinctions, parmi lesquelles un Oscar, quatre BAFTA Awards, trois Emmy Awards, un Grammy Award et trois Golden Globe Awards. Son influence sur le cinéma est indéniable, et il est lui-même un ardent défenseur et historien du 7e art, s'impliquant activement dans la préservation du cinéma mondial à travers des initiatives comme le World Cinema Project et l'African Film Heritage Project. Il a d'ailleurs cité de nombreux cinéastes qui l'ont influencé ou qu'il admire, démontrant sa profonde cinéphilie. Sa perspective sur le cinéma et son goût pour les œuvres singulières confèrent un poids particulier à ses éloges.

Le Tango de Satan : une œuvre cinématographique singulière
L'œuvre dont il est question est Le Tango de Satan, un drame hongrois de 1994 réalisé par Béla Tarr. Il s'agit d'une adaptation cinématographique du premier roman de l'écrivain László Krasznahorkai publié en 1985. Le film est célèbre pour sa durée extraordinaire de plus de sept heures et a été tourné en noir et blanc, renforçant l'atmosphère sombre et désolée qu'il dépeint. L'intrigue suit les destins des habitants d'une communauté agricole isolée en Hongrie à la fin de l'ère communiste, une période marquée par la dépression économique et le déclin.
Ce qui distingue Sátántangó de son titre original est sa structure narrative et son style visuel audacieux. Le film est divisé en douze chapitres offrant un nouvel éclairage sur les thèmes du film à travers différents points de vue de personnages. Béla Tarr utilise des plans extrêmement longs, dont la durée moyenne est de 145,7 secondes, le plan le plus long atteignant même plus de dix minutes. Ce rythme lent et contemplatif, caractérisé par de longues séquences et des mouvements de caméra lents, confère au film son rythme et son style uniques. Le critique pour The Guardian, Theo Tait, a souligné l'influence perceptible de Franz Kafka et Samuel Beckett sur le roman original.
Depuis sa sortie, Le Tango de Satan jouit d'un accueil critique très favorable, sa réputation grandissant notamment dans les cercles du cinéma d'art et d'essai. Le film affiche d'ailleurs un taux d'approbation de 100% sur Rotten Tomatoes. La réalisation de Béla Tarr a été fréquemment louée. J. Hoberman du Village Voice l'a décrit comme "l'un des grands films, largement invisibles". Jonathan Rosenbaum du Chicago Reader a quant à lui déclaré que le film était son préféré des années 1990. Pour Susan Sontag, il est "dévastateur, captivant à chaque minute de ses sept heures", ajoutant qu'elle serait "heureuse de le revoir chaque année pour le reste de sa vie". En raison de sa longueur, Le Tango de Satan a rencontré des difficultés pour être distribuer en dehors de la Hongrie. Sa réputation s'est donc forgée au fil des années, contribuant à consolider son statut de film culte.

L'éloge de Martin Scorsese
Parmi les admirateurs les plus éminents de Sátántangó figure Martin Scorsese. Le réalisateur américain n'a pas ménagé ses propos à l'égard de Béla Tarr, le qualifiant d'un des "artistes les plus audacieux du cinéma". Scorsese a spécifiquement mentionné Le Tango de Satan (ainsi que Le Cheval de Turin) pour illustrer la nature immersive des films de Tarr, affirmant qu'ils "sont de véritables expériences que vous absorbez et qui évoluent dans votre esprit". Cette appréciation va au-delà d'une simple préférence, soulignant la capacité du film à marquer durablement le spectateur, à devenir une partie intégrante de sa réflexion sur l'art cinématographique. L'éloge de Scorsese, lui-même défenseur de la diversité cinématographique et fin connaisseur du cinéma, renforce la reconnaissance de Sátántangó comme une œuvre d'une importance capitale, malgré son format exigeant et sa distribution limitée. Il témoigne de l'impact profond que peuvent avoir des films qui s'éloignent des conventions narratives et rythmiques habituelles, offrant au spectateur une immersion totale dans un univers singulier.