Alors que le réalisateur Quentin Tarantino a bâti sa carrière sur une cinéphilie érudite et un goût prononcé pour les œuvres percutantes, il n’est pas avare en critiques lorsqu’il s’agit de télévision. Pourtant, une série américaine, relativement méconnue du grand public, a su retenir toute son attention — au point qu’il l’a visionnée non pas une, mais trois fois. C’est ce qu’il a révélé en 2015 lors d’un long entretien accordé au média culturel américain Vulture, où il évoquait ses influences, ses goûts personnels, et ses réserves vis-à-vis de certaines tendances modernes du petit écran. Cette confession a depuis été régulièrement relayée, relançant l’intérêt pour une œuvre pourtant restée discrète à sa sortie.
Une série qui échappe au radar grand public, mais pas à Tarantino
Dans cet entretien, Tarantino évoque sa fascination pour The Newsroom, une série américaine diffusée entre 2012 et 2014 sur HBO. Créée par Aaron Sorkin, le scénariste à l’origine de The West Wing et The Social Network, The Newsroom suit l’équipe d’un journal télévisé fictif alors qu’elle tente de redéfinir le journalisme face à la pression des audiences et aux événements marquants du début des années 2010. Ce parti pris narratif, alliant réflexion politique et tensions en direct, a visiblement séduit Tarantino, qui avoue l’avoir visionnée intégralement à trois reprises — une rareté pour un cinéaste connu pour sa sélectivité.
La série HBO que j'ai adorée est The Newsroom d'Aaron Sorkin. C'est la seule série que j'ai littéralement regardée trois fois. Je la regardais à sept heures le dimanche, lorsque la nouvelle émission passait. Puis, une fois qu'elle était terminée, je la regardais à nouveau. Ensuite, je finissais généralement par la regarder une fois pendant la semaine, juste pour pouvoir écouter les dialogues une fois de plus.
À rebours des séries grand public, The Newsroom a été considérée par une partie des critiques comme trop élitiste et moralisateur. spectateurs, mais elle incarne justement, pour Tarantino, une forme d'excellence narrative aujourd’hui trop rare à la télévision.
Une critique impitoyable de séries récentes
Ce qui rend sa déclaration d’autant plus frappante, c’est que Tarantino se montre généralement très critique vis-à-vis des séries contemporaines. Dans cette même interview accordé à Vulture, il a publiquement exprimé sa déception envers la première saison de True Detective, pourtant encensée par la critique et le public.
J'ai essayé de regarder le premier épisode de la saison 1, et je n'ai pas du tout accroché. Je l'ai trouvé vraiment ennuyeux. Et la deuxième saison a l'air horrible. Rien que la bande-annonce - tous ces beaux acteurs qui essaient de ne pas être beaux et qui se promènent en ayant l'air de porter le poids du monde sur leurs épaules. C'est tellement sérieux, et ils sont tellement torturés, essayant d'avoir l'air malheureux avec leurs moustaches et leurs vêtements délabrés.
Il s’était également montré dubitatif face à Yellowstone, la série western moderne de Taylor Sheridan, qu’il avait qualifiée de "soap opéra" bien ficelé, mais peu stimulant.
S'il est probable que, depuis l'entretien, d'autres séries ait pu taper dans l'œil de Tarantino, The Newsroom reste probablement aujourd’hu l'un de ses coups de cœur de ces dernières années. Si elle reste moins populaire que d'autres séries HBO (Game of Thrones, Chernobyl ou récemment The Last of Us et The White Lotus, l’adoubement d’un cinéaste aussi exigeant pourrait contribuer à la faire redécouvrir. Pour ceux qui cherchent une série à la fois engagée, tendue et brillamment écrite, le conseil de Tarantino mérite sans doute d’être suivi. 'Après tout, il a été primé deux fois aux Oscar dans la catégorie du meilleur scénario : seul 4 ont fait pareil exploit, Woody Allen étant le seul à avoir remporter trois prix'. Et au vu de son exigence, ce simple aveu "la seule que j’ai vue trois fois''" résonne presque comme une consécration.