Film culte des années 2000, American Psycho a connu a regain de popularité ces dernières années, notamment auprès des jeunes hommes. Un engouement soudain que la réalisatrice Mary Harron a du mal à comprendre alors qu’il va justement à l’encontre des propos du film.
Adulé pour les mauvaises raisons
Sorti il y a maintenant 25 ans, American Psycho est aujourd'hui considéré comme un classique du cinéma américain. Mais ces dernières années, le film a connu un énorme regain de popularité, entraîné notamment par la réappropriation de l'hygiène de vie de l'infâme Patrick Bateman par la droite masculiniste. Un enthousiasme soudain difficile à comprendre, surtout pour la réalisatrice Mary Harron qui estime que, justement, son film se moque ouvertement de ce mode de vie. Interrogée pour l'anniversaire d'American Psycho par Letterboxd, la cinéaste s'est dite "perplexe" face à la façon dont son long-métrage a été "adopté par les Wall Street Bros".
Je suis toujours aussi perplexe. Je ne pense pas que Guinevere (Turner, coscénariste et actrice d'American Psycho) et moi nous attendions à ce que ce soit adopté par les "Wall Street Bros". Ce n'était pas notre intention. Alors, avons-nous échoué ? Je ne sais pas pourquoi, car Christian se moque clairement d'eux… Mais les gens lisent la Bible et décident d'aller tuer beaucoup de gens. Ils lisent L'Attrape-cœurs et décident de tirer sur le président.

"La satire d'un homme gay sur la masculinité"
Au-delà de son incompréhension, Mary Harron exprime aussi son désarroi face à la situation alors qu'elle explique que, pour elle et sa coscénariste Guinevere Turner, l'oeuvre originale de Bret Easton Ellis s'avère être une "satire d'un homme gay sur la masculinité".
Il était clair pour moi et Guinevere, qui est gay, que nous voyions cela comme une satire de la masculinité par un homme gay. Le fait que Bret Easton Ellis, auteur d'American Psycho , soit gay lui a permis de voir les rituels homoérotiques de ces mâles alpha, ce qui est également vrai dans le sport, à Wall Street et dans toutes ces choses où les hommes valorisent leur esprit de compétition extrême et leur capacité à “élever leurs prouesses”. Il y a quelque chose de très gay dans leur façon de fétichiser l'apparence et la salle de sport.
Visiblement abasourdie par le fait qu'une partie du public ait pris son film et l'oeuvre de Bret Easton Ellis au pied de la lettre, Mary Harron termine par exprimer son étonnement face à l'évolution de la société, qu'elle dénonçait déjà il y a 25 ans.
Il s'agissait d'une société prédatrice, et aujourd'hui, 25 ans plus tard, la situation est bien pire. Les riches sont bien plus riches, les pauvres sont bien plus pauvres. Je n'aurais jamais imaginé qu'il y aurait une telle célébration du racisme et de la suprématie blanche, ce qui est fondamentalement le cas à la Maison Blanche. Je n'aurais jamais imaginé que nous vivrions une telle expérience.
Plus actuel que jamais, American Psycho devrait bientôt faire son retour sur le devant de la scène. Un remake produit par Lionsgate a été confié à Luca Guadagnino, l'un des porte-étendards du cinéma indépendant américain contemporain, qui a notamment réalisé Call Me By Your Name et Challengers.