Après des débuts glaçants explorant les dérives de notre rapport à la technologie sur Channel 4, la série britannique d’anthologie Black Mirror a trouvé une nouvelle maison sur Netflix, adoptant une tonalité parfois plus formatée. La septième saison, récemment dévoilée, présente-elle le retour aux sources promis aux fans depuis plusieurs mois ?
Diffusé pour la première fois en 2011, Black Mirror nous livrait des épisodes glaçants évoquant notre rapport à la technologie, avant d’adopter une atmosphère plus formatée à l’ère Netflix, une fois que le géant du streaming a acquis les droits de la série de Charlie Brooker. Annoncée comme un retour aux sources, la septième saison fraîchement parue sur la plateforme semble encore chercher sa nouvelle identité tout en jetant un regard nostalgique sur son passé.
Dès le premier épisode, Common People, on retrouve un peu l'ADN de la série d'anthologie : une technologie qui s'immisce dans le quotidien d'un couple ordinaire (Chris O'Dowd et Rashida Jones) et dont les conséquences deviennent vite cauchemardesques. On sent que la série essaie de retrouver ses fondamentaux, mais avec une approche peut-être un peu moins brutale qu'avant. L'idée d'une procédure expérimentale pour sauver la vie de l'un d'eux, avec des coûts qui ne cessent de grimper, est une nouvelle fois une critique acerbe de notre société de consommation et de l'ère de l'abonnement. Si l'épisode est bien ficelé et soulève des questions pertinentes sur le prix de la vie, on peut néanmoins dire que l'histoire progresse de manière prévisible. Puis Bête Noire arrive, abordant le thème intrigant de l'effet Mandela et de la manipulation psychologique facilitée par la technologie. L'ambiance est pesante, et les actrices Siena Kelly et Rosy McEwen sont convaincantes dans ce jeu de méfiance ultra captivant.

Le retour raté de Bandersnatch
Avec Hotel Reverie, on part sur une idée plus originale : une actrice (Issa Rae) est engagée pour refaire un vieux film en interagissant avec des versions IA des acteurs originaux (dont une performance remarquée d'Emma Corrin). L'épisode oscille entre la comédie et des aspets plus durs et profonds au sujet de la nature de la réalité et de la conscience dans un monde où la technologie permet de recréer le passé. Si l'idée de départ est brillante et offre un commentaire sur la réutilisation cynique de la propriété intellectuelle à Hollywood, on se retrouve surtout complétement face à une tentative de retrouver la magie d'un épisode comme San Junipero.
Plaything est peut-être l'épisode le moins convaincant du lot. Se présentant comme un quasi-spin-off de Bandersnatch, l'histoire d'un homme (Peter Capaldi) obsédé par un jeu vidéo étrange résulte en un récit confus et peu pertinent, ne parvenant pas à explorer de manière convaincante les thèmes de l'intelligence artificielle et de notre relation avec la technologie. D'autant que l'apparition de Will Poulter dans son rôle d'origine est tout de même particulièrement fugace.

Le meilleur épisode de la saison
La saison se redresse une fois encore avec Eulogy, qui est pour beaucoup le joyau de cette nouvelle salve d'épisodes. L'interprétation poignante de Paul Giamatti (déjà formidable dernièrement dans Winter's Break) dans le rôle d'un homme qui participe à un mémorial interactif pour une ancienne amante est tout simplement exceptionnelle. Ici, Black Mirror prouve qu'il peut émouvoir profondément sans nécessairement recourir à des dystopies technologiques terrifiantes. Enfin, USS Callister: Into Infinity est la première suite directe d'un épisode de Black Mirror, reprenant l'histoire du célèbre USS Callister de la quatrième saison. On retrouve l'équipage de clones numériques luttant pour leur survie dans le jeu Infinity. Et même s'il est indéniable que l'épisode soit divertissant et bien produit, il n'apporte finalement pas grand-chose de nouveau à l'histoire originale.

Globalement, cette saison 7 de Black Mirror semble en tout cas marquer une évolution pour la série. On sent une véritable volonté d'explorer des thèmes plus intimes et émotionnels, avec une approche parfois moins nihiliste qu'auparavant, mais bien plus axée sur l'humain. Une fois n'est pas coutume, la série nous sert une saison dont la qualité des épisodes est inégale, mais parvient une fois encore à continuer de susciter la réflexion sur notre rapport au monde numérique. Reste à voir si la série parviendra, à terme, à trouver un nouvel équilibre pour continuer à nous faire réfléchir sur notre avenir technologique avec la même acuité qu'à ses débuts. Pour l’heure, ce n’est pas gagné, mais il y a du mieux.