Un procès relance le débat sur la propriété des jeux vidéo en dématérialisé. Ubisoft affirme sans détour : acheter un jeu ne signifie pas en être le propriétaire. De quoi inquiéter les joueurs attachés à leurs bibliothèques numériques.
Tout part d’un événement survenu en avril 2024 : Ubisoft annonçait la fermeture des serveurs de The Crew, un jeu de course en ligne lancé en 2014. Quelques jours plus tard, le jeu n’était plus jouable, même pas de mode solo. Un joueur américain, outré d’avoir perdu l’accès à son achat, a poursuivi l’éditeur en justice. Il estime qu’en l’empêchant de jouer à un produit qu’il a payé, Ubisoft le prive de ses droits en tant que consommateur.

La réponse d’Ubisoft ne s’est pas fait attendre : les joueurs n’achètent pas un jeu, mais une licence d'utilisation. Dans les documents légaux partagés par le site Polygon, l’éditeur explique que ce fonctionnement est clairement spécifié dans ses conditions d’utilisation, acceptées lors de tout achat. Ainsi, Ubisoft se réserve le droit de suspendre ou de supprimer l’accès à un jeu, notamment s’il dépend de serveurs qu’il n’est plus rentable de le maintenir actif.
Un modèle en ligne qui interroge les joueurs
Cette affaire relance un débat de fond sur la propriété numérique. Pendant des années, acheter un jeu signifiait l’avoir à vie, sur cartouche ou sur disque. Mais avec l’ère du dématérialisé et des services en ligne, ce modèle s’effondre. De nombreux jeux nécessitent une connexion permanente ou dépendent d’une infrastructure serveur, comme The Crew.



Ubisoft n’est pas le seul acteur concerné : d’autres éditeurs comme EA, Activision ou Sony appliquent des politiques similaires. Mais c’est la fermeté de la position d’Ubisoft dans ce procès qui a fait réagir une partie du public. Sur les réseaux sociaux, les réactions sont vives : certains joueurs affirment qu’ils se tourneront vers le piratage ou la préservation illégale pour conserver l’accès à leurs jeux, quand d'autres pointent du doigt un modèle économique basé sur l'obsolescence.
Vers une remise en question du marché numérique ?
Cette affaire pourrait avoir des répercussions durables dans la sphère vidéoludique. D’un côté, elle met en lumière l’importance des conditions d’utilisation souvent ignorées par les consommateurs. De l’autre, elle pose la question de la valeur réelle d’un bien numérique. Si les joueurs ne sont que des "locataires" de leurs jeux, pourquoi les paient-ils au prix fort ?
Certains appellent déjà à une évolution du cadre légal, pour garantir un droit à la préservation ou un remboursement en cas de retrait d’un jeu. Cette affaire rappelle une réalité : en achetant un jeu en ligne, vous ne l’achetez pas vraiment. Pour le moment, il n’existe qu’une seule plateforme qui n’est pas affectée par ces droits numériques (DRM) : c’est GOG.