Le film d’animation The Witcher : Sirènes des profondeurs est disponible sur Netflix depuis le 11 février à 09h01 heure française. J’ai pu le voir en avance et il constitue selon moi la meilleure porte d’entrée à l’univers… même s’il risque de se mettre à dos une partie de ses spectateurs. Ma critique en quelques lignes.
Note : j'ai regardé en The Witcher : Sirens of the Deep avec les voix anglaises et les sous-titres en français.
Le mélange des deux communautés
The Witcher : Sirènes de profondeurs, disponible depuis le 11 février sur Netflix, est un film d'animation d'1h30 prenant place dans l'univers de The Witcher. Ce n'est pas une histoire originale puisqu'il adapte la nouvelle Une once d'abnégation du deuxième livre (L'épée de la Providence) de la saga littéraire. Un choix judicieux pour plusieurs raisons. Tout d'abord parce que, comme l'intégralité des nouvelles, cette histoire se situe avant les événements de l'intrigue principale. Pas besoin d'avoir ni lu les livres, ni joué aux jeux, ni d'avoir regardé la série, ni rien du tout. Un choix d'autant plus judicieux que cette nouvelle couvre les éléments-clé qui font le succès de son univers : de la géopolitique avec un conflit entre humains et créatures aquatiques ; une relation amoureuse ; de la chasse aux monstres et une morale non-manichéenne.
On retrouve dans les équipes plusieurs individus déjà connus. C'est Lauren Schmidt Hissrich qui gère la production, comme pour la série Netflix. Aussi impliqué sur le live-action, Mike Ostrowski est à plume. En ce qui concerne la direction artistique, c'est le studio Mir (derrière les deux adaptations en séries animées de Castlevania) que l'on retrouve aux commandes. Et probablement dans un souci de réunir les vieux initiés de l'univers aux plus récents, on retrouve Doug Cockle pour la voix de Geralt (c'est lui aussi dans les jeux) ainsi que les acteurs de la série Joey Batey et Anya Chalotra respectivement pour Jaskier et Yennefer.


Une histoire déjà racontée mais accessible à tous
De fait, avoir choisi la nouvelle Une once d'abnégation permet de mettre sur le devant de la scène Yennefer et Jaskier, deux personnages plus qu'importants pour le personnage de Geralt. Quelque chose qui n'est pas forcément possible avec les autres contes. Cela permet donc déjà, pour les spectateurs appréciant le film, de faire le lien avec les autres productions autour de la licence quelles qu'elles soient.
Mais je l'ai dit, il y a plusieurs raison qui font de The Witcher : Les Sirènes des Profondeurs un long-métrage idéal pour se plonger dans l'univers et, bien sûr, la présence d'une majorité des thèmes abordés. Dès les premiers instants du film, on trouve un Geralt sans le sous. Ce n'est pas que les contrats manquent mais il décide de lui-même de ne pas aller au bout. C'est son code moral, celui de ne pas s'immiscer dans les affaires politiques des autres, qui lui vaut de broyer du noir le ventre vide à l'une des auberges de Bremervoord. Fort heureusement, le village est la terre natale de Jaskier. Les choses vont vite s'accélérer à partir du moment où le régent de la région mandate le troubadour et ami du sorceleur à venir faire un concert au palais.
Dans la grande salle du château, Geralt est présenté à Essi : c'est une amie d'enfance de Jaskier qui est, elle aussi, devenue barde. L'adaptation fait le choix de d'intégrer la romance au récit qui permet d'avoir, bien que traités rapidement, les différents états d'âmes du sorceleur quant à sa situation amoureuse qui n'est floue que pour lui.
Les premières minutes privilégiées pour décrire la situation et les personnages, The Witcher : Les Sirènes des Profondeurs s'emploie aussi à rentrer dans le récit. Les retournements de situations sont nombreux, comme les scènes d'action durant lesquelles on retrouve toute la danse particulière du Sorceleur lorsqu'il s'agit de faire valser son épée.

Un récit en surface, les fans vont grincer des dents
On a pu le voir ces dernières semaines avec le trailer présentant le jeu vidéo The Witcher 4 : certains membres de la communauté sont pointilleux quant il s'agit d'adaptations de leur saga littéraire préférée. Le long-métrage animé risque alors de les titiller sur quelques points. Outre les petits détails comme la possibilité pour Geralt d'utiliser de magie ( les souffles de feu sont loin des simples Igni qu'il peut lancer ) ou Jaskier se battant à l'épée, c'est sur un constat plus général qu'ils risquent d'être frustrés.
Se voulant accessible, Les Sirènes des Profondeurs ne fait qu'effleurer certaines thématiques vues dans la nouvelle. Quelque chose que l'on peut attribuer à la difficulté d'adapter un texte écrit en un film animé de 90 minutes. Néanmoins, ça ne s'arrête pas là. Le long-métrage semble, selon moi, aller un peu à l'encontre de l'une des règles d'or de l'auteur original : faire de ses histoires des récits ni blancs ni noirs avec cette thématique du "moindre mal". Un sacrifice peut-être inévitable quand il s'agit de porter le récit de The Witcher sur petit écran.

Un excellent film animé
Le fond mis à part, The Witcher : Sirènes des profondeurs affiche une excellente qualité de production. La mise en scène se renouvelle régulièrement, que ce soit par des perspectives différentes ou une réécriture de certains passages (on assiste à une comédie musicale merveilleuse par exemple ). Le rythme est maîtrisé avec des passages pleins d'actions qui savent laisser la place au récit tout en le dynamisant. Par aillleurs, comme pour Castlevania, le studio MIR réussit son design des personnages.
On regrette toutefois la discrétion inhabituelle de la bande-originale qui est pourtant une caractérisque souvent mise en avant dans les productions cross-média du Sorceleur. On déplore également, d'autant qu'il y en a de multiples, des scènes d'action qui manquent parfois de panache avec plusieurs séquences composés de plans non-animées.

Toujours est-il que, de manière globale, le film affiche une excellente production et l'on a hâte de voir le prochain produit : quelque chose de teasé par l'épilogue qui ouvre sur une autre aventure de Geralt déjà traitée par l'auteur original dans L'Épée de la Providence avec la nouvelle Les limites du possible. The Witcher : Sirènes des Profondeurs est, à n'en pas douter, la porte d'entrée la plus efficace pour quiconque souhaite rentrer dans l'univers créé par Andrzej Sapkowski. Le film arrive, en 90 minutes, à présenter des personnages importants tout en se posant à part de la temporalité principale pour éviter les incompréhensions. S'il ne fait qu'effleurer en surface, ce qui pourra frustrer les fans, la profondeur du récit, le long-métrage, par sa qualité globale, devrait satisfaire la majeure partie des spectateurs.