Nuclear War : Un jeu vidéo des années 80 qui illustre l'absurdité de la guerre nucléaire

Titre original : Il y a 36 ans, ce jeu vidéo ne vous permettait pas vraiment de gagner, et c'était sa leçon

L’apocalypse générale causée par une éventuelle guerre nucléaire a souvent été traitée dans la grande histoire du divertissement. Films, séries, jeux vidéo… de nombreuses productions ont exposé les terribles menaces qui pèsent sur nous quand des puissances atomiques s’affrontent. C’est le cas de Nuclear War, sorti en 1989 sur Amiga et PC (MS-Dos), qui, à l’instar d’un certain WarGames réalisé par John Badham, insiste sur le fait qu’il n’y a pas vraiment de gagnant quand les bombes H explosent.

Sommaire

  • Obsession d’une époque
  • Des pixels et des ogives
  • Tenter de conquérir le monde !
  • Attaque nucléaire post-mortem

Obsession d’une époque

Le jour d’après, WarGames, Testament, Threads, Quand le vent souffle… du thriller technologique au film d’animation, de Mick Jackson à John Badham, les films abordant le délicat thème de la guerre nucléaire sont nombreux dans les années 1980. Quoi de plus normal ? C’est lors de cette décennie que la guerre froide connaît un regain de tensions entre les États-Unis et l'Union soviétique, ce qui provoque une course à l’armement nucléaire. Les blocs s’observent, s’insultent, se provoquent et sont à deux pas de s’affronter à coups de bombes.

Il y a 36 ans, ce jeu vidéo ne vous permettait pas vraiment de gagner, et c'était sa leçon

Dans ce contexte extrêmement tendu où deux forces adverses multiplient les intimidations, les réalisateurs traitent des angoisses populaires, mais plutôt que d’aller vers le sensationnalisme, ils préfèrent insister sur une doctrine bien connue des experts. En cas de guerre atomique, tous les camps seraient annihilés. C’est ce que l’on appelle la destruction mutuelle assurée (DMA) : la seule issue dans une guerre nucléaire serait l'autodestruction, et l’histoire ne pourrait retenir aucun gagnant. Pourquoi faire une guerre atomique quand personne ne peut gagner ?

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Des pixels et des ogives

Si la sphère cinématographique a régulièrement mis en scène l’horreur d’un conflit nucléaire au cours des années 1980, le jeu vidéo n’est pas en reste. Missile Command, Balance of Power, Defcon 5, Theatre Europe… plusieurs titres nous ont demandé d’éviter que le monde n’explose sous les bombes H. Avec un manque de subtilité, parfois, mais l’essentiel est ailleurs : contrairement à un film, un jeu vidéo sous-entend que l’on peut gagner. C’est une des bases de nos productions vidéoludiques par rapport aux longs-métrages, grâce à ses choix et à sa dextérité, le joueur peut briller. Mais quand un soft traite de guerre nucléaire, est-il toujours possible de lui permettre de remporter la partie ? Cela n’irait pas à l’encontre même de la doctrine DMA évoquée plus haut ?

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C’est à cette question que tente de répondre – avec pas mal d’humour satirique – le jeu conçu par New World Computing en 1989, Nuclear War. Prenant comme source d'inspiration Docteur Folamour, la comédie militaire de Stanley Kubrick sortie en 1969 à qui il rend hommage dès sa scène d’introduction avec son cow-boy posé à califourchon sur une ogive, le soft s'apparente à un classique jeu de stratégie au tour par tour. Il n’y a rien de très étonnant à cela puisqu’il est basé sur le jeu de cartes du même nom sorti dans les années 1960. Le but est simple : dominer le monde, que cela se fasse à l’aide de la propagande ou sous une pluie de bombes !

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Tenter de conquérir le monde !

Dès l’écran de sélection des factions, qui se comptent au nombre de 10 au total, on comprend que Nuclear War n’est pas un jeu comme les autres. Les petites têtes affichées à l’écran, symbolisant les dirigeants que le joueur peut incarner/combattre, sont en fait des caricatures de personnalités politiques. Reagan, Thacher, Castro, Gaddafi, Gorbachev ou encore Gandhi, tous veulent mener leur nation à la victoire. Une fois la partie véritablement lancée, les quatre leaders (dont celui dirigé par l’utilisateur) ont pour but ultime de faire disparaître leurs adversaires. À la fin du jeu, il ne doit en rester qu’un !

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L’interface montre en temps réel les bouilles des dirigeants, qui ont vite fait de se lancer dans des simagrées de tous les diables une fois leur population touchée par une frappe tactique. D’un simple clic, il est possible de passer de la carte de son pays à celle d’un opposant, et d’afficher son attitude envers un autre chef. Au fur et à mesure que la partie avance, chaque action influe sur les sentiments de chaque chef à votre égard et à l'égard des autres. Durant son tour de jeu, le joueur a le choix entre construire un arsenal nucléaire, lancer une campagne de propagande, préparer un système de défense ou organiser une frappe nucléaire. Attention cependant, construire de l’armement deux tours de suite est immédiatement perçu comme hostile par les leaders qui perçoivent cela comme un comportement belliqueux non assumé.

Il y a 36 ans, ce jeu vidéo ne vous permettait pas vraiment de gagner, et c'était sa leçon

Système de production dépendant du nombre de villes restantes, éléments à construire de puissances diverses, campagne de propagande pour siphonner des citoyens… Nuclear War propose plusieurs mécaniques qui font de lui un vrai bon jeu de stratégie, quand bien même il y aurait quelques limites, à l’image de l’impossibilité de choisir ce que l’on veut construire entre avions, ogives ou systèmes de défense. Oui, le hasard est bien là, que ce soit dans les effets des bombes ou dans les événements farfelus auxquels il faut faire face. N’oublions pas qu’à la base, Nuclear War s’inspire d’un jeu de cartes. Ceci étant dit, nous n’avons pas abordé ce qui fait le sel de mer iodé du soft, à savoir… les frappes nucléaires.


Attaque nucléaire post-mortem

La tête de votre voisin ne vous revient pas ? Vous en avez assez que la propagande d’une autre nation vous pique de la main d'œuvre ? Peu importe le différend qui vous oblige à appuyer sur le bouton rouge, parfois, faire pousser un champignon atomique dans la ville d’un adversaire est l’unique solution envisageable. Elle est la forme d'attaque la plus meurtrière et la plus efficace de Nuclear War, mais elle a une particularité : elle nécessite un minimum de deux tours pour être exécutée. Le premier sert en effet à préparer le porte-avions ainsi que la charge nucléaire, tandis que le second est là pour envoyer la frappe sur la ville décidée par le joueur. Cela signifie que vos concurrents savent ce que vous manigancez sans connaître le pays qui sera touché, et peuvent durant leur tour activer leurs systèmes de défense, à moins bien sûr que quelque chose ne les en empêche. Quand une bombe atomique explose, un compteur de morts apparaît. 7 millions par-ci, 5 millions par-là. C’est l'apocalypse !

Il y a 36 ans, ce jeu vidéo ne vous permettait pas vraiment de gagner, et c'était sa leçon

Ce n’est pas tout. Lorsque la dernière ville d'un pays est détruite, ce dernier envoie alors ses ogives aléatoirement contre les participants restants, un peu à la manière de ce que l’on connaît sous le nom de “Perimeter”, système de défense attaquant automatiquement quand il détecte une frappe nucléaire sur son sol. Grâce à cette fabuleuse trouvaille, il peut arriver qu’un match ne compte aucun gagnant. Cette revanche d’outre-tombe est capable d'annihiler celui qui a frappé en premier, ce qui engendre un match nul et déroule une cut-scene où l’on admire l’explosion de la planète. Quand un leader dirigé par l’IA gagne, on le voit danser sur un champ de ruines en hurlant “j’ai gagné”. Gagné quoi, au juste, s’il ne reste plus rien ? Quand c’est le joueur qui l’emporte, il n’a même pas le droit à cette animation amusante et arrive directement à l’écran de score, lui aussi affiché sur un paysage apocalyptique. Le message est clair : dans une guerre nucléaire, personne ne gagne vraiment.

Il y a 36 ans, ce jeu vidéo ne vous permettait pas vraiment de gagner, et c'était sa leçon

Sorti en 1989, l’année de la chute du mur de Berlin, Nuclear War est aussi drôle qu’intéressant à jouer. Si vous êtes curieux, sachez que vous pouvez le tester dans sa version DOS directement sur InternetArchive.